Bible Commentaries
Jean 13

La Bible Annotée de NeuchâtelLa Bible Annotée de Neuchâtel

versets 1-38

Verset 1

Troisi�me partie (chapitres 13 � 17)

Le Fils de Dieu et les siens

J�sus lave les pieds des disciples et �loigne Judas

Versets 1 � 20 � Le lavement des pieds

Les mots?: avant la f�te de P�que ne renferment qu�une indication vague de la date du dernier souper (verset 2) que J�sus fit avec ses disciples et par cons�quent de sa mort, qui eut lieu le lendemain.

Comme nous abordons, avec le Jean 13, le r�cit de la Passion du Sauveur, c�est ici le lieu de donner une vue d�ensemble de cette question chronologique, l�une des plus obscures que soul�ve l�histoire �vang�lique. La tradition unanime d�signe le vendredi comme le jour o� J�sus mourut.

L�incertitude commence quand il s�agit de d�terminer les relations de cet �v�nement avec la P�que juive et de fixer le jour du mois o� il eut lieu.

Les uns, se fondant sur les donn�es, � leurs yeux inattaquables, des synoptiques, disent que J�sus prit le dernier repas avec ses disciples le soir du 14 Nisan, � l�heure o� tous les Juifs mangeaient l�agneau pascal et qu�il mourut sur la croix le 15 Nisan le grand jour de la f�te de P�que.

Les autres, s�appuyant sur des indications du quatri�me �vangile qui ne leur paraissent pas susceptibles d��tre d�tourn�es de leur sens premier et naturel, estiment que le dernier repas eut lieu le soir du 13 Nisan et que J�sus est mort le 14.

La discussion remonte aux premiers si�cles. Elle fut compliqu�e, d�s l�origine, par une pol�mique d�ordre liturgique entre les �glises d�Occident et celles d�Asie Mineure, connue sous le nom de dispute pascale (Voir introduction). Nous ne reviendrons pas sur cette dispute, car, de l�avis m�me des d�fenseurs de la chronologie des synoptiques, elle ne fournit pas d�argument p�remptoire pour d�cider � quelle date Jean s�est arr�t� dans son �vangile.

Ce d�bat divise les savants les plus comp�tents. Olshausen, Tholuck, Wieseler, Ebrard, Hengstenberg, Riggenbach, Lange, MM. Luthardt, Keil, Zahn se prononcent pour le 14-15 Nisan et estiment g�n�ralement pouvoir accorder avec cette date les donn�es du quatri�me �vangile.

La date du 13-14 Nisan est adopt�e par de Wette, L�cke, Bleek, N�ander, Meyer, MM. Weiss, Beyschlag, Godet, Chastand.

1� En faveur de la date du 14-15 Nisan, on invoque les passages suivants?: Matthieu�26.17 �?Le premier jour des pains sans levain (14 Nisan), les disciples s�approch�rent de J�sus, en disant?: Ou veux-tu que nous te pr�parions le repas de la P�que???�

Marc�14.12 �?Et le premier jour des pains sans levain, quand on immolait la P�que, ses disciples lui disent?: O� veux-tu que nous allions faire les pr�paratifs pour que tu manges la P�que???�

Luc�22.7 �?Or, le jour des pains sans levain arriva, dans lequel devait �tre immol�e la P�que?�.

Il ne peut y avoir aucune h�sitation sur la date, clairement indiqu�e par ces passages. Or les donn�es des synoptiques ont une valeur tr�s grande � cause des rapports du premier �vangile avec l�ap�tre dont il porte le nom et de Marc avec l�ap�tre Pierre. Du reste, les indications fournies par les trois premiers �vang�listes ne sont pas des opinions individuelles?: elles repr�sentent la croyance de l��glise enti�re jusque vers l�an 80. Elles ont de plus pour elles leur vraisemblance.

Le dernier repas que J�sus prit avec ses disciples fut le repas pascal des Juifs. Cela ressort du r�cit des pr�paratifs dans les synoptiques et d�une parole telle que celle-ci?: �?J�ai ardemment d�sir� de manger cette P�que avec vous avant que je souffre?� (Luc�22.15).

Or J�sus ne pouvait prendre le repas pascal qu�� l�heure o� tout Isra�l le prenait, le soir du 14 Nisan (commencement du 15). Les ordonnances de la loi �taient formelles (Exode�12.6 et suivants, L�vitique�23.5-6?; Nombres�28.16-18?; Deut�ronome�16.2-3).

L�agneau pascal devait �tre immol� dans le temple et l�on ne proc�dait pas � ce sacrifice avant le jour fix�.

Admettant pour ces raisons, que J�sus a mang� la P�que le 14 Nisan et est mort le 15, les interpr�tes et les historiens qui reconnaissent l�authenticit� du quatri�me �vangile ou du moins attribuent quelque valeur � ses donn�es historiques, sont oblig�s d�accuser l��vang�liste d�une erreur, imputable � �?une pr�occupation dogmatique?: il fait mettre J�sus en croix le 14 Nisan, � l�heure m�me o� l�on immolait l�agneau pascal, parce qu�il voit un rapprochement � faire entre les deux actes?� (Edmond Stapfer).

Ou bien, pour maintenir l�exactitude de ses donn�es chronologiques, ils doivent chercher � les interpr�ter de telle sorte qu�elles fixent, aussi bien que celles des synoptiques, le dernier repas de J�sus au 14 Nisan.

2� Ceci nous am�ne � faire un rapide examen des passages de notre �vangile, desquels on peut d�duire la date que Jean assignait au dernier souper. Jean�12.1 �?Six jours avant la P�que J�sus arriva � B�thanie?�.

Cette arriv�e ne put avoir lieu le samedi, car J�sus n�aurait pas fait un jour de sabbat le voyage de J�richo � B�thanie. Elle doit �tre fix�e au vendredi soir. Or, en comptant six jours depuis ce vendredi, Jean place au jeudi le commencement de la P�que?; ce jeudi �tait donc, pour lui comme pour les premiers �vang�listes, le 14 Nisan.

Voici le d�faut de ce raisonnement?: rien ne d�montre que Jean ait compt� le vendredi comme le premier des six Jours qu�il indique. Le contraire est aussi probable, car J�sus arrive sans doute vers le soir � B�thanie et le sabbat commen�ait pour les Juifs le vendredi au coucher du soleil. Le passage invoqu� ne tranche la question ni dans un sens ni dans l�autre.

verset 1. Avant la f�te de P�que� Est-il naturel que Jean d�signe ainsi la soir�e du 14-15 Nisan, le moment du repas pascal, principal acte de la f�te?!

C�est en vain que l�on cite Nombres�28.16 et suivants, L�vitique�23.5 et suivants?; o� la f�te des pains sans levain semble ne commencer que le lendemain 16 Nisan. Dans ces passages m�mes, le 14 est appel� la P�que et d�ailleurs on mangeait des pains sans levain au repas pascal. Exode�12.8?; Josu�5.10-11 et Matthieu�26.17 (voir la note) mettent hors de doute que la f�te de P�que commen�ait pour les Juifs avec la soir�e du 14 Nisan.

verset 29. Judas n�aurait pu �?acheter ce dont on avait besoin pour la f�te?� dans cette soir�e du 14, o� toutes les familles �taient assembl�es dans leurs demeures autour de l�agneau pascal. Les partisans du 14 Nisan r�pondent que, si nous �tions au 13 Nisan, toute la journ�e du lendemain resterait pour ces emplettes et l�id�e ne viendrait pas aux disciples que J�sus p�t envoyer Judas les faire sur l�heure m�me.

Jean�18.28 �?Ils n�entr�rent point eux-m�mes dans le pr�toire, afin de ne pas se souiller et de pouvoir manger la P�que?�. Ce passage est d�cisif aux yeux de la plupart des interpr�tes. Les Juifs n�avaient pas encore mang� l�agneau pascal?; ils s�appr�taient � le manger le soir de ce jour. Ce jour �tait donc, d�apr�s notre �vangile, le 14 Nisan. Ceux qui le contestent sont oblig�s de donner � l�expression �?manger la P�que?�, le sens ind�termin� de c�l�brer la f�te de P�que. Cette interpr�tation est peu probable, malgr� les arguments sp�cieux dont on essaie de l�appuyer.

Jean�19.14-31 �?C��tait la pr�paration de la P�que, ce jour de sabbat �tait un grand jour?�. Le terme de �?pr�paration?�, n�est pas seulement la d�signation usuelle du vendredi veille du sabbat (Marc�15.42), puisque l��vang�liste ajoute express�ment �?de la P�que?;?� de plus, si le sabbat du lendemain �tait �?un grand jour?�, c�est qu�il co�ncidait cette ann�e-l� avec le premier jour des pains sans levain, 15 Nisan.

L�interpr�tation naturelle de tous ces passages de notre �vangile nous oblige donc � admettre que, d�apr�s lui, J�sus a pris son dernier repas avec ses disciples le soir du 13 Nisan et est mort le 14 Nisan. Cette donn�e constitue-t-elle une erreur?? Nullement. Elle nous para�t beaucoup plus vraisemblable que celle des synoptiques. La nuit du 14 au 15 Nisan avait tous les caract�res d�un sabbat solennel (Exode�12.16). Le Talmud confirme cette indication de la loi et mentionne parmi les actes d�fendus le port des armes, les s�ances de tribunal, le prononc� d�une sentence et les ex�cutions.

D�apr�s Exode�12.22?; Deut�ronome�16.5-7, on ne pouvait quitter sa demeure ni, en tout cas, sortir de la ville pendant la nuit du repas pascal. Or Judas ne doute pas que J�sus ne se rende cette nuit-l�, selon sa coutume, en Geths�man�?; la troupe qu�il y conduit est compos�e de serviteurs du sanh�drin qu�accompagnent m�me les sacrificateurs et des pharisiens, le sanh�drin s�assemble, d�lib�re et prononce un jugement, peu avant le crucifiement, Simon de Cyr�ne revient des champs, o� il avait travaill�, selon toute probabilit�, J�sus est crucifi�, il est vrai, par des soldats romains, mais les chefs juifs font toutes sortes de d�marches peu compatibles avec la c�l�bration de la f�te.

Si nous �tions le premier et grand jour de la f�te de P�que, leur conduite formerait un contraste �trange avec les scrupules du roi H�rode Agrippa, qui n�ose juger et ex�cuter Pierre pendant la f�te (Actes�12.3-4). Eux, qui firent si souvent � J�sus un crime de violer le sabbat, auraient ainsi oubli� toutes les prescriptions de la loi qui assimilait le grand jour de P�que � un sabbat. Le fanatisme ne peut expliquer une telle attitude?; ils n�en sont du reste pas tellement domin�s, puisqu�ils �vitent d�entrer dans le pr�toire (Jean�18.28), r�serve qui n��tait pas de nature � disposer Pilate en leur faveur.

Ajoutons enfin qu�apr�s la mort de J�sus, Joseph d�Arimath�e ach�te un linceul (Marc�15.46) et que les femmes renoncent � embaumer J�sus, parce que le sabbat approche (Luc�23.56).

Tous ces faits semblent prouver que le jour de la mort de J�sus n��tait pas un jour de f�te. Or la plupart d�entre eux sont rapport�s par le r�cit des synoptiques?; ceux-ci contredisent ainsi la date qu�ils assignent eux-m�mes aux �v�nements.

L�erreur qu�ils ont commise, sans en avoir conscience, s�explique par le fait que dans ce dernier souper avec ses disciples J�sus avait tenu � manger avec eux la P�que (Luc�22.15) et qu�il s��tait conform� au rituel de la c�r�monie juive.

La tradition admit pour cette raison que le repas avait eu lieu au jour fix� par la loi. Elle perdit de vue que J�sus avait anticip� la c�l�bration de la P�que, circonstance secondaire dont le souvenir put fort bien s�effacer.

Que des narrations n�es spontan�ment des besoins de la pr�dication et dont l�exactitude chronologique �tait le moindre souci, aient commis une erreur d�un jour en pla�ant au 14 et au 15 Nisan des �v�nements qui s��taient accomplis le 13 et le 14, cela n�est nullement inadmissible.

Nos deux premiers �vangiles n�ont-ils pas plac� le repas de B�thanie �?deux jours?� avant la P�que?? (Marc�14.1-9?; Matthieu�26.6, note). Si leurs r�dacteurs et leurs premiers lecteurs ne se sont pas fait les objections que nous avons expos�es ci-dessus, c�est qu�ils attribuaient au fanatisme ces violations de la loi commises par les autorit�s sacerdotales et y voyaient une aggravation du crime dont elles s��taient rendues coupables en tuant le Messie.

L�erreur de Jean, au contraire, ne saurait �tre expliqu�e. Un d�faut de m�moire est inadmissible de la part du disciple qui avait suivi les �v�nements avec un calme courage et qui en demeure le principal t�moin. Et l�on ne saurait sans injustice l�accuser d�avoir volontairement antidat� la mort de J�sus pour ob�ir � des pr�occupations dogmatiques. Lui seul, au contraire, avait l�autorit� n�cessaire pour corriger la tradition qui s��tait �tablie. S�il ne la rectifie pas en termes plus expr�s, c�est qu�une telle rectification ne s�accordait pas avec le caract�re de sa narration. Il lui suffisait, par les d�tails de celle-ci, de replacer les faits � leur vraie date.

Objectera-t-on � cette date que J�sus ne pouvait se s�parer de son peuple et d�roger � la coutume �tablie par la loi en c�l�brant le repas pascal la veille du jour fix�?? Mais celui qui se proclamait �?le Seigneur du sabbat?� ne pouvait-il se permettre cette l�g�re infraction au rituel pascal, au moment surtout o� il allait lui substituer un rite nouveau?? Il �tait du reste excommuni� ainsi que ses disciples, les sacrificateurs auraient refus� d�immoler pour lui un agneau dans le temple. Il �tait oblig� de c�l�brer cette P�que d�une mani�re ind�pendante?: c�est ce qui le conduisit � l�anticiper.

Cette anticipation n�est elle pas indiqu�e dans le message qu�il envoie au propri�taire de la chambre haute?? �?Mon temps est proche?; que je fasse la P�que chez toi avec mes disciples?� (Matthieu�26.18).

Comme le remarque M. Godet, �?la seule relation satisfaisante � �tablir entre ces deux propositions est celle-ci?: il faut que je me h�te, car demain ce sera trop tard?; je ne serai plus l�, fais donc en sorte que je puisse manger imm�diatement la P�que chez toi (verbe au pr�sent)?�.

Le disciple bien-aim� nous fait lire dans le c�ur de son Ma�tre, il peint en quatre traits les circonstances ext�rieures et int�rieures au milieu desquelles J�sus s�abaissa jusqu�� laver les pieds de ses disciples. Premier trait?: J�sus allait accomplir cet acte sachant que son heure �tait venue, cette heure solennelle, supr�me, dont notre �vangile parle si Souvent (Jean�7.30?; Jean�8.20?; Jean�12.23). J�sus savait que cette heure �tait celle de ses souffrances et de sa mort?; mais il savait aussi que ce sombre d�fil� le faisait passer de ce monde au P�re. Second trait?: cette pens�e si douce de quitter ce monde agit� et hostile pour rentrer dans le sein de l�amour �ternel, �tait ins�parable d�une autre pens�e, celle qu�il allait quitter les siens ses chers disciples, qu�il avait toujours aim�s, auxquels il avait donn� tant de preuves de cet amour. Or, sachant qu�il les laissait dans le monde o� ils �taient, expos�s � tant de dangers et de souffrances, il les aima jusqu�� la fin (Marc�13.13), ou mieux?: au plus haut degr� (Weiss). M. Godet traduit?: �?Il acheva de leur t�moigner tout son amour?�. Et il va leur en donner le t�moignage le plus �mouvant. Chaque disciple de J�sus peut aussi recueillir dans son c�ur cette parole comme une pr�cieuse promesse que son Sauveur l�aimera jusqu�� la fin.

Verset 2

Non pas apr�s le souper comme traduisent � tort nos versions ordinaires?: mais, grec un souper �tant venu, au moment o� l�on venait de se mettre � table (verset 4 et 12).

M�me la le�on re�ue, qui porte le participe aoriste, ne signifie pas?: un repas ayant eu lieu mais?: �tant arriv� et en cours d�ex�cution (Weiss).

Il est probable qu�il faut lire le participe pr�sent, selon le texte de Codex Sinaiticus, B, adopt� par la plupart des critiques.

De l�absence d�article devant souper plusieurs interpr�tes concluent que l�auteur ne consid�re pas ce souper comme le repas pascal. Cette conclusion ne nous para�t pas justifi�e, car dans le grec du Nouveau Testament l�article manque souvent l� o� les �crivains classiques l�auraient mis et l�auteur de notre �vangile a compos� son r�cit pour des lecteurs qui savaient par les synoptiques que J�sus avait mang� la P�que avec ses disciples la veille de sa mort?; ces lecteurs ne pouvaient penser � un autre repas que ce repas pascal qui leur �tait bien connu.

Troisi�me trait de cette introduction profonde par laquelle Jean pr�pare ses lecteurs � l�action qui va suivre?: le diable avait d�j� fait son �uvre dans le c�ur de Judas.

Mais quel est le but de cette remarque??

Suivant les uns, elle doit marquer l�imminence de la catastrophe, en montrant que d�j� le tra�tre, sous l�inspiration du d�mon, avait con�u son noir dessein (comparez Matthieu�26.14-16) et que J�sus, qui ne l�ignorait pas, voulut saisir ce moment supr�me pour t�moigner aux siens son amour.

D�autres pensent que l��vang�liste signale ce fait pour mieux faire ressortir le support et la charit� de J�sus qui allait laver les pieds de Judas lui-m�me. M. Godet estime que ce trait doit �?motiver les diff�rentes allusions que J�sus va faire � la pr�sence du tra�tre dans tout le cours de la sc�ne suivante (comparez versets 10, 18, 21, 26) et surtout expliquer la conduite et le mot s�v�re de J�sus?�, verset 27

Ces allusions elles-m�mes n�avaient d�autre but que d�avertir le malheureux disciple, de r�veiller sa conscience, de le sauver encore si possible.

Une variante de Codex Sinaiticus, B, Itala, admise par la plupart des critiques et des ex�g�tes porte?: �?Le diable ayant d�j� jet� dans le c�ur que Judas, fils de Simon, l�Iscariot le livr�t?�. Le c�ur de qui?? Pas du diable lui-m�me, comme le pr�tendait Meyer, mais de Judas Iscariot dont le nom abhorr� a �t� rel�gu� � l� fin de la phrase pour porter l�accent.

Verset 3

Ce quatri�me trait de l�introduction nous montre que J�sus va agir dans la pleine conscience de son �ternelle divinit�.

Ce sentiment est rendu ici par trois d�clarations d�une sublime grandeur.

La premi�re exprime l�autorit� et la puissance divines?: il sait que le P�re lui a remis (grec donn�) toutes choses entre les mains (comparer Matthieu�28.18).

La seconde nous r�v�le sa pr�existence �ternelle?: il est (grec) sorti de la part de Dieu (comparer Jean�8.42).

La troisi�me nous montre en J�sus le pressentiment de la gloire divine dont il va reprendre possession?: il va � Dieu (Verbe au pr�sent?; comparez Jean�17.5).

Et c�est avec cette conscience de sa grandeur divine que J�sus va condescendre � faire l��uvre d�un esclave?!

Verset 5

Quel contraste entre les pens�es du verset 3 et cette sc�ne du verset 4.

Avec quelle �motion Jean la d�crit jusque dans ses moindres d�tails?! Il la rend vivante et tout � fait actuelle par ces verbes au pr�sent?: il se l�ve, pose ses v�tements (v�tements de dessus, le manteau, qui l�aurait g�n� dans son action et il ne garde que la tunique, costume des esclaves), puis il verse de l�eau dans le bassin, celui qui se trouvait l� et servait � cet usage.

M�me cette expression il se mit, que Jean n�emploie presque jamais, a quelque chose de solennel. Quel �tonnement et quelle confusion pour les disciples?! On le comprendra d�autant mieux si l�on admet, avec la plupart des interpr�tes anciens et modernes, que cette action de J�sus fut provoqu�e par une discussion qui venait de s��lever entre les disciples sur cette question?: �?Lequel d�entre eux �tait estim� le plus grand?� (Luc�22.24, note).

Elle �tait donc litt�ralement vraie, la parole que J�sus leur adresse alors?: �?Moi je suis au milieu de vous comme celui qui sert?� (Luc�22.27).

Pour comprendre cette sc�ne, assez �trang�re � nos m�urs, il faut se souvenir que chez les orientaux, ou l�on se chaussait de sandales qui laissaient le pied nu, il �tait d�usage de proc�der � l�ablution quand on entrait dans une maison, surtout quand on allait y prendre un repas. Mais c��tait un esclave que l�on chargeait de cet office.

Verset 6

Pierre, dont l��me ardente est pleine de v�n�ration et d�amour pour le Sauveur, a compris la le�on qu�il veut donner � ses disciples?; il a honte et il exprime son sentiment en relevant le contraste criant par ces deux mots?: Toi, � moi?! Et le titre de Seigneur, que J�sus va approuver et r�clamer (verset 13), rend le contraste encore plus complet.

Il est dit d�abord?: il commen�a, puis?: il vient donc � Simon Pierre?; ce disciple ne fut donc pas le premier auquel J�sus lava les pieds.

Les mots et celui-ci manquent dans quelques manuscrits.

Verset 7

Grec?: tu le conna�tras apr�s ces choses, ou apr�s ceci.

Quelques interpr�tes ont suppos� que J�sus d�signait par l� le moment ou Pierre serait �clair� par l�Esprit de Dieu. Mais il est plus simple de rapporter ces mots � l�explication que J�sus allait donner � ses disciples (verset 12 et suivants).

Cette parole est d�une application universelle � toutes les voies du Seigneur que nous ne comprenons pas au moment m�me.

Verset 8

Jamais, grec en �ternit�.

Il y a dans ce refus absolu de Pierre une v�h�mence bien en harmonie avec son caract�re. Pierre montre sa v�n�ration et son amour pour le Ma�tre?; mais il oublie que le premier devoir d�un disciple c�est l�ob�issance. Sa pr�somption lui cache son ignorance (tu ne sais pas) et l�emp�che de recevoir avec confiance la promesse de J�sus (tu comprendras dans la suite).

La r�ponse de J�sus � la premi�re objection de son disciple �tait pleine de douceur et de bont�. Sur son refus r�it�r� il lui parle d�un ton s�v�re. Sa menace dut produire d�autant plus d�effet que Pierre s��tait montr�, r�cemment encore (Matthieu�19.27), pr�occup� des avantages que lui procurerait son d�vouement � J�sus.

Mais que signifient les paroles de J�sus?! Il est �vident qu�ici et au verset 10, J�sus donne � son action une signification nouvelle. Elle n�est plus seulement un �?exemple?� (verset 15) d�humble d�vouement au service d�autrui. Elle devient le symbole de la r�g�n�ration, qui est la condition du Salut (comparer verset 10, note).

En effet, avoir part avec lui, c�est trouver dans sa communion le pardon des p�ch�s, la r�conciliation avec Dieu, la vie �ternelle?; n�avoir point de part avec lui, c�est �tre priv� de ces immenses bienfaits (Luc�12.46?; Apocalypse�20.6?; Apocalypse�21.8?; Apocalypse�22.19).

Or il est clair que J�sus ne pouvait pas faire d�pendre cette alternative du simple fait de laver, ou de ne laver pas, les pieds de son disciple. Il faut remarquer d�ailleurs que J�sus lui dit?: �?si je ne te lave?�, ce qui est tout diff�rent de laver les pieds.

Ces paroles signifient donc?: Si je ne te purifie de ta volont� propre, de tes p�ch�s, de ta corruption naturelle, tu n�as point de part avec moi.

J�sus aime � s��lever ainsi d�un objet actuel, ext�rieur, a une pens�e plus haute et plus intime. Comme dans son entretien avec la Samaritaine l�eau est pour lui l�image de l�Esprit, de m�me ici son action, qui devait �tre avant tout pour les disciples un exemple d�humilit�, devient l�image de la purification spirituelle qu�il op�re et qui est la condition du salut. C�est l� ce qu�il rappelle � Pierre.� Luthardt

Verset 9

Pierre a-t-il compris la pens�e profonde de son Ma�tre?? Dans ce cas, sa r�ponse signifie?: �?Seigneur, ne me lave pas seulement les pieds, mais purifie-moi dans tout mon �tre?!?� C�est ainsi que quelques interpr�tes (Tholuck, Luthardt) comprennent le disciple.

D�autres pensent au contraire que Pierre sans se donner le temps de r�fl�chir (Marc�9.5-6), mais saisi, effray� � la pens�e d��tre exclu de la communion de son Sauveur, se livre � lui avec l�imp�tuosit� de son caract�re et d�passe le but, parce qu�il conserve encore sa volont� propre, tout en ob�issant.

C�est ainsi que Olshausen, Meyer, Asti� interpr�tent la pens�e de ce disciple. Il est, en effet, difficile de croire que Pierre se soit �lev� d�embl�e � l�id�e d�un renouvellement spirituel.

Verset 10

Variante du Codex Sinaiticus?: n�a pas besoin de se laver, il est pur tout entier.

J�sus ne d�sapprouve pas le z�le de son disciple?; il rectifie avec douceur l�erreur dans laquelle il �tait et il profite de cette erreur m�me pour ajouter � la le�on qu�il voulait d�abord donner aux siens (verset 8, 2e note), un enseignement nouveau.

Laver les pieds �tait un acte par lequel le Sauveur s�humiliait. Laver aussi les mains et la t�te, l��tre tout entier, donnait � l�acte un autre caract�re.

L�image dont il se sert est celle-ci?: un homme qui s�est baign� enti�rement lav�, n�a plus besoin, en rentrant chez lui, que de laver ses pieds pour les purifier de la poussi�re qui s�y est attach�e pendant le trajet (verset 5, note).

De cette image le Sauveur tire une instruction encourageante pour ses disciples?: quand un homme a �t� purifi� par le pardon de ses p�ch�s et par le renouvellement de sa nature morale, il n�a plus besoin que d��tre lav� des in�vitables souillures qu�il peut contracter en marchant dans ce monde corrompu?; alors il est pur tout entier et il n�a pas � remettre sans cesse en question son �tat de gr�ce et de salut.

Pour donner � cette v�rit� plus de force et de pr�cision, il l�applique imm�diatement � ses disciples?: et vous, vous �tes purs?; et il leur dira bient�t comment ils le sont devenus (Jean�15.3). Mais, h�las?! Ils ne l��taient pas tous?; et l��vang�liste, dans le verset suivant, nous apprend la raison de cette restriction.

On peut remarquer encore, avec Meyer, que si, jusqu�ici, Pierre n�avait pas compris le sens le plus profond de l�action de son Ma�tre, il dut le saisir par cette application directe que J�sus en faisait � ses disciples. Et cependant, il reste encore � celui-ci � en tirer pour eux la le�on de charit� qu�il pensait leur donner d�s le d�but (verset 12 et suivants).

Verset 15

Comprenez-vous ce que je vous ai fait?? en avez-vous saisi la signification profonde??

C�est par cette question que J�sus introduit l�instruction qu�il veut donner � ses disciples. Ceux-ci l�appelaient ordinairement Rabbi, Ma�tre, celui qui enseigne et J�sus r�clamait ce titre pour lui seul, dans son acception la plus �lev�e (Matthieu�23.8).

Ils l�appelaient encore le Seigneur, nom qui devait prendre pour eux un sens de plus en plus religieux, car c�est par ce vocable que la version grecque des Septante traduit constamment le nom de J�hovah.

J�sus approuve et ajoute?: Si donc, moi, le Seigneur et le Ma�tre, je me suis abaiss� jusqu�� vous laver les pieds, � plus forte raison devez-vous aussi �tre pr�ts � vous rendre mutuellement les services les plus humbles du d�vouement et de l�amour.

Comme J�sus fut, dans toute sa vie, le mod�le accompli que les siens doivent imiter, il venait de leur donner, dans ce cas particulier, un exemple d�humilit� profonde et d�amour sans bornes, qui restait comme l�id�al vers lequel ils devaient tendre. Ici encore, J�sus enseigne en action ce qu�il avait enseign� en paroles (Luc�22.26?; Matthieu�20.26).

Nous avons donn� un sens tout moral � cet ordre?: Vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres et c�est bien l� sa signification principale?; mais nous nous garderons d�exclure le sens litt�ral, dans les cas o� un tel devoir s�impose.

L�ap�tre Paul vante l�ablution des pieds comme une des pratiques de l�hospitalit� chez les premiers chr�tiens (1�Timoth�e�5.10).

Toutefois J�sus n�a pas voulu instituer un rite, comme l��glise l�a admis d�s le quatri�me si�cle, accomplir litt�ralement ce devoir sans l�humilit� et l�amour qu�il suppose, est une vaine formalit� ou m�me un acte d�hypocrisie et d�orgueil. Cette c�r�monie se pratique chaque ann�e � Rome et ailleurs.

Verset 16

Donc, vous, serviteurs et ap�tres, vous ne devez pas vous refuser � des actes d�humilit� et d�amour que votre Seigneur et Ma�tre vient d�accomplir.

J�sus aimait cette comparaison qu�il emploie souvent ailleurs, dans des applications diverses (Jean�15.20?; Matthieu�10.24-25?; Luc�6.40).

Verset 17

Entre savoir et, faire, il y a un ab�me?; le premier � lui seul, rend coupable, le dernier rend heureux, car il donne au disciple un trait pr�cieux de ressemblance avec le Ma�tre?: l�humilit� et l�amour.

On voit que J�sus en exhortant les disciples � imiter son exemple passe sous silence le sens particulier que la r�sistance de Pierre l�avait amen� � donner � son action (versets 8-10, note).

La raison en est bien simple, c�est que, lui seul, au moyen de son sang et de son Esprit, peut purifier le p�cheur de ses souillures. Nous ne pouvons avoir � cette �uvre qu�une part tr�s indirecte pour d�autres en les amenant � J�sus. Dans ce sens, l�exemple nous concerne aussi.

Verset 18

Je ne dis point cela de vous tous, c�est-�-dire, que vous �tes heureux (verset 17), car il en est un au milieu de vous qui ne le sera jamais. En effet, je sais tr�s bien quels sont ceux que j�ai choisis, je les connais, je les p�n�tre jusqu�au fond. Ce n�est donc point par erreur que j�ai choisi Judas, mais afin d�accomplir le dessein de Dieu, pr�dit dans les �critures (voir la note suivante et comparez Jean�6.64-70, note).

Plusieurs interpr�tes ont entendu ce choix dans le sens de l��lection pour le salut. Mais le contexte et les deux passages que nous venons de citer ne sont pas favorables � cette opinion.

Grec?: mais (il en est ainsi) afin que l��criture soit accomplie (comparer Jean�17.12, o� la m�me pens�e myst�rieuse est exprim�e dans les m�mes termes). La parole de l��criture que J�sus applique ici � Judas est tir�e du Psaumes�41.10.

Manger du pain avec quelqu�un, c�est-�-dire �tre re�u � sa table, signifie, selon les m�urs orientales, �tre admis dans sa familiarit� et dans sa confiance, comme un h�te dans sa maison?; toute perfidie de la part de cet h�te en devient beaucoup plus coupable.

L�expression?: lever son talon contre quelqu�un, comme le cheval qui rue, est l�image de la brutalit�, non de la ruse.

Si ce Psaume est de David, comme l�indique sa suscription (voir Bible annot�e) le personnage historique auquel se rapporte cette parole est Achitophel, conseiller de David (2�Samuel�15.12), qui prit parti pour Absalom dans la r�volte de ce fils ingrat contre son p�re (2�Samuel�17.14) et qui, voyant sa trahison d�couverte, s�en alla et s��trangla (2�Samuel�17.23).

�trange ressemblance de sa destin�e avec celle de Judas, auquel J�sus applique ces paroles?! La plainte de David, sur ce tra�tre, se lit ainsi dans l�h�breu?: �?M�me l�homme avec qui j��tais en paix, en qui je me confiais, qui mangeait mon pain, a lev� le talon contre moi?�. J�sus �vite de dire mon pain, parce que, pauvre, il n�en avait point � donner. Mais il faisait mieux pour Judas?: il lui donnait le pain de vie.

C�est ce qu�ont m�connu les copistes, qui, pour conformer la citation au texte du Psaume, ont �crit?: Celui qui mange mon pain (B, C), au lieu de?: celui qui mange du pain avec moi (Sin, A, D, majuscules, versions).

Verset 19

Grec?: que, je suis.

Que je suis tout ce que je vous ai r�v�l� sur ma personne, le Messie, le Fils de Dieu, le Sauveur (voir sur cette expression Jean�8.24?; Jean�8.28?; Jean�8.58 notes).

J�sus tient � avertir ses disciples de la trahison de Judas (versets 11 et 21), craignant que leur foi en lui ne f�t �branl�e s�il ne la leur avait pas pr�dite et s�il leur paraissait, � la fois, la dupe et la victime de ce crime horrible.

Verset 20

Voir, sur ces paroles, Matthieu�10.40, note.

Ici, on ne voit pas au premier abord comment elles s�adaptent � l�ensemble du discours.

Quelques ex�g�tes sont all�s jusqu�� penser qu�elles n��taient qu�une reproduction d�plac�e du passage de Matthieu. Parmi ceux qui rejettent avec raison cette supposition, les uns MM. Weiss et Godet rattachent cette solennelle d�claration (en v�rit�, en v�rit�) au verset 16 et alors elle signifierait?: Si le serviteur, l�envoy� ne doit pas vouloir �tre plus que le Ma�tre et le Seigneur, celui-ci, de son c�t�, veut l��lever jusqu�� sa hauteur l��galer � lui, comme lui est �gal� au P�re qui l�a envoy�.

J�sus venait de dire?: le serviteur n�est pas plus grand que le Ma�tre?; il semble dire maintenant?: et il n�est pas moins grand que lui.� Godet

D�autres rapprochent ce verset des paroles?: (verset 17) �?Vous �tes bienheureux?� et J�sus ferait ainsi sentir � ses disciples, en quoi consiste ce bonheur.

D�autres enfin, trouvant peu naturelle cette liaison avec des paroles d�j� �loign�es, rattachent notre verset � ce qui pr�c�de imm�diatement. J�sus vient de dire que le crime de Judas n��branlera pas la foi des disciples et il leur donne ici un nouveau et puissant motif d�assurance, dans la pens�e que, en remplissant leur sainte mission, ils seront re�us comme lui-m�me, qui est au milieu d�eux le repr�sentant et l�envoy� de Dieu. En travaillant pour lui, ils travailleront pour Dieu m�me qui sera leur lumi�re et leur force.

Telle est l�interpr�tation de Meyer qui �tait d�j� d�fendue par Calvin �?Il est plus probable que Christ a ici voulu rem�dier au scandale� Cette admonition du Seigneur J�sus montre que ce n�est point une chose raisonnable que l�impi�t� d�aucuns, qui conversent m�chamment ou autrement qu�il ne faut en leur office, diminue quelque chose de l�autorit� apostolique?�.

Verset 21

J�sus �loigne le tra�tre (21-30)

Apr�s avoir dit ces choses, c�est-�-dire apr�s la s�rieuse instruction que J�sus venait de donner � ses disciples (versets 12-20), sa pens�e se reporte avec douleur sur Judas, il en est troubl� en son esprit.

Deux fois d�j�, il a fait allusion au crime de ce malheureux (verset 11 et 18)?; maintenant le moment est venu d�en avertir directement les disciples?; il le fait avec la plus grande solennit�.

C�est un t�moignage qu�il rend en ces termes si graves?: En v�rit�, en v�rit�, puis il r�v�le ce fait inou�?: l�un de vous me livrera.

Cette r�v�lation, n�cessaire aux disciples (verset 19), est aussi rapport�e par les trois premiers �vangiles, dans les m�mes termes (Matthieu�26.21?; Marc�14.18?; Luc�22.21).

Preuve �vidente que Jean raconte le m�me souper que les synoptiques (comparer verset 36 et suivants).

Verset 22

Grec?: �tant en perplexit� pour savoir duquel il parlait.

L�impression douloureuse que les disciples re�urent de cette r�v�lation est exprim�e avec beaucoup plus de force dans les premiers �vangiles?: �?Ils furent fort attrist�s et ils se mirent chacun d�eux � dire?: Seigneur, est-ce moi???� (Matthieu�26.22) C�est le trouble o� ils �taient qui leur inspire cette question.

Verset 23

Chez les Orientaux, on se mettait � table � demi couch� sur le c�t� gauche et appuy� sur les coussins d�un divan.

Celui qui se trouvait � la droite de son voisin, �tait donc pench� sur son sein (Luc�7.38, note).

Jean, �vitant de se nommer, se d�signe par ces mots?: celui que J�sus aimait (Jean�19.26?; Jean�20.2?; Jean�21.7-20).

Il lui para�t plus pr�cieux d��tre aim� du Sauveur et de rester ignor�, que de devenir c�l�bre sous son propre nom.� Gerlachap

J�sus aimait tous ses disciples (Jean�15.14), mais Jean �tait �videmment pour lui un ami particulier, auquel il d�voilait ses intimes pens�es et qui les comprenait le mieux.

Verset 24

Pierre, profond�ment afflig� de ce qu�il vient d�entendre, toujours ardent dans ses impressions, ne peut garder le silence.

Il fait donc signe � Jean de demander � J�sus duquel d�entre eux il parlait.

Une variante de B, C, Itala porte?: �?Pierre lui fait signe lui dit?: Dis quel est celui dont il parle?�. Mais cela supposerait que Jean le savait et d�ailleurs, puisque Pierre devait lui faire signe, cela prouve qu�il �tait trop �loign� de lui pour lui parler.

Le texte re�u, A, D, majusc, est donc pr�f�rable.

Verset 26

Deux variantes sont � noter dans les versets 25 et 26?:

  1. Codex Sinaiticus, D, majuscules portent?: Celui-ci donc s��tant pench�.Le texte que nous avons adopt� avec Westcott et Hort, Nestle, Weiss, est celui de B, C.
  2. Ces deux derniers manuscrits ont la le�on admise au verset 26?; les autres portent?: � qui je donnerai le morceau l�ayant tremp�.

Dans le repas de la P�que, le p�re de famille donnait aux convives des morceaux de pain tremp�s dans un brouet de fruits cuits (Matthieu�26.23, note). En donnant ainsi le morceau � Judas, J�sus le d�signait � Jean?; mais en m�me temps, il adressait un supr�me appel � la conscience du trait�e.

Si, en le recevant, son c�ur se f�t bris�, il pouvait encore obtenir gr�ce. Ce moment �tait donc d�cisif?; et c�est ce que Jean fait sentir par ce mot alors (verset 27), mot d�une gravit� tragique.� Godet

J�sus parlait � voix basse, de mani�re � n��tre entendu que de Jean (verset 28), et cela, par m�nagement pour Judas. Dans les autres �vangiles, de m�me, J�sus d�signe le malheureux disciple en termes vagues (Matthieu�26.23?; Luc�22.21).

Mais il para�t que la sc�ne se prolongea par les questions des disciples qui demandaient?: �?Est-ce moi, Seigneur???� Et quand Judas poussa l�hypocrisie jusqu�� dire aussi?: �?Est-ce moi???� J�sus lui r�pondit ouvertement?: Tu l�as dit?! Mais m�me ce dialogue para�t n�avoir pas �t� entendu ou compris des autres disciples (Matthieu�26.25, note).

Verset 27

Alors, ce mot, effac� par la plupart de nos versions (Codex Sinaiticus, D l�omettent), marque, nous l�avons dit, le moment fatal.

Mais il ne faudrait pas voir dans le fait exprim� par ces mots?: Satan entra en lui, une action magique du morceau de pain. Jean ne dit pas?: avec le morceau, mais?: apr�s le morceau.

La prise de possession du c�ur de Judas par Satan s�explique, au contraire, d�une mani�re toute psychologique. Judas, en c�dant � ses passions, � l�avarice (Jean�12.6), avait ouvert son c�ur � l�influence du d�mon?; puis, se voyant d��u dans son ambition, irrit� de ne pas trouver en suivant J�sus ce qu�il avait esp�r�, il n��prouva plus pour lui qu�une sorte de r�pulsion et de haine.

Et c�est sous l�influence de l�esprit de t�n�bres qu�il con�ut l�id�e horrible de sa trahison (verset 2). Notre �vang�liste marque donc les degr�s de sa chute. Au moment o� le malheureux se vit p�n�tr� par son Ma�tre, il veut dans sa conscience une crise qui pouvait le ramener encore.

Son �me avait � choisir entre J�sus et Satan.� Luthardt

Mais il s�endurcit et se livra ainsi � la puissance de l�esprit du mal. C�est ce moment tragique que Jean d�crit par ce mot?: Satan entra en lui. Luc (Luc�22.3) exprime ce d�nouement dans les m�mes termes (comparer sur la chute de ce disciple, Matthieu�26.15, note).

On a donn� de cet ordre de J�sus � Judas deux explications qui sont loin de s�exclure l�une l�autre.

Meyer pense que J�sus d�sire r�ellement d�accomplir le plus t�t possible son sacrifice, sachant que son heure �tait venue?; �?sa d�cision r�sign�e ne veut aucun d�lai?�, dit cet ex�g�te.

D�autres interpr�tes cherchent l�explication de cet ordre dans le besoin pressant qu�avait J�sus de voir s��loigner le tra�tre pour rester seul avec ses disciples fid�les, dans ces derni�res heures si importantes.

La soir�e �tait d�j� avanc�e (verset 30) et J�sus avait besoin du peu de temps qui lui restait pour achever son �uvre aupr�s des siens.� Godet

Il est certain que cette derni�re pens�e se fait jour au verset 31. Au reste, si J�sus avait eu le moindre espoir de voir Judas revenir � lui, il ne lui aurait pas donn� cet ordre dont l�ex�g�se rationaliste s�est souvent scandalis�e?; mais aux yeux de Celui oui sonde les c�urs, la destin�e de Judas �tait accomplie, Satan �tait entr� en lui.

Verset 28

Aucun. M. Godet pense que Jean s�excepte tacitement lui-m�me.

M. Weiss n�est pas de cet avis. Il estime que Jean, aussi bien que les autres, ne dut pas comprendre la port�e de l�ordre de J�sus, parce qu�il ne pouvait se douter que la trahison de Judas fut si proche et que J�sus lui-m�me l�invitait � la consommer.

Verset 29

Jean donne cette double supposition de quelques-uns des disciples comme une preuve qu�ils n�avaient pas compris.

C�est ici le second passage de notre �vangile (comparez verset 1, note) d�o� l�on tire un indice que ce repas ne pouvait avoir lieu le soir du 14 Nisan, selon la chronologie des synoptiques?; car comment acheter ce qu�il fallait pour la f�te, puisque la f�te �tait commenc�e par son acte le plus important et que, d�s lors, des achats ne devaient plus �tre permis??

Les d�fenseurs de la date fournie par les synoptiques r�pondent qu�il s�agissait de provisions pour toute la dur�e de la f�te. Ils citent le passage Exode�12.16 d�apr�s lequel la foi autorisait les familles isra�lites, m�me le 15 nisan, � �?pr�parer la nourriture de chaque personne?� et en concluent qu�on pouvait m�me faire des achats?; conclusion quelque peu forc�e.

Ils objectent, d�autre part, que si ce repas avait eu lieu le 13, les disciples ne penseraient pas qu�il fall�t faire en toute h�te des approvisionnements pour la f�te, puisque le lendemain restait pour cela tout entier. Mais ils peuvent avoir interpr�t� ainsi l�ordre de J�sus sans avoir compris ses motifs.

Verset 30

D�apr�s Matthieu�26.21 et Marc�14.18, l�entretien touchant Judas, pendant lequel J�sus lui donna le morceau tremp�, eut lieu avant l�institution de la c�ne et comme ici on voit que ce disciple sortit aussit�t qu�il eut pris le morceau, il est clair qu�il ne participa pas � la c�ne qui, du reste, ne fut c�l�br�e qu�apr�s le repas de la P�que.

Luc seul rapporte ces �v�nements de mani�re � autoriser une conclusion diff�rente, mais il est probable qu�il ne suit pas l�ordre chronologique (comparer Luc�22.21, note).

Il �tait nuit?! Non seulement dans la nature, mais plus encore dans l��me de Judas. On sent aussi dans cette remarque du t�moin oculaire, que Jean avait conserv� de ce moment une impression ineffa�able.

Sa narration, comme l�observe M. Godet, est toute parsem�e de pareils traits, qui ne s�expliquent que par la vivacit� du souvenir personnel.� Jean�1.40?; Jean�6.59?; Jean�8.20?; Jean�10.23

Verset 31

Entretiens de J�sus avec ses disciples

Versets 31 � 38 � La s�paration prochaine, l�amour fraternel, consolation des disciples

Verset 32

Maintenant?! Le d�part du tra�tre, sorti pour accomplir son �uvre de t�n�bres, cause � J�sus un immense soulagement.

Maintenant le Fils de l�homme a �t� glorifi�.

Ce verbe au pass� embrasse toute la vie �coul�e du Sauveur jusqu�� ce moment, cette vie de renoncement, de souffrances, d�ob�issance, de d�vouement efficace, d�activit� puissante, par laquelle le Fils de l�homme a �t� glorifi� dans le c�ur de ceux qui l�ont reconnu comme l�envoy� de Dieu (Jean�11.4?; Jean�12.28, 2e note).

Cette gloire qu�il a ainsi acquise par l�humilit� et la charit� resplendira encore de l��clat le plus pur dans ses humiliations et ses souffrances, en Geths�man� et sur la croix, o� il pourra s��crier de sa voix mourante?: Tout est accompli?! Son �uvre sera achev�e, il aura sauv� un monde perdu.

Mais par une telle vie Dieu a �t� glorifi� en lui. La gloire de Dieu, ce sont ses perfections, sa Justice et sa saintet�, sa mis�ricorde et son amour?; jamais elles n�ont �t� manifest�es d�une mani�re plus lumineuse qu�en J�sus-Christ, qui nous les r�v�le dans leur pleine harmonie.

Or le sentiment profond d�avoir ainsi glorifi� Dieu par sa parfaite ob�issance (si Dieu a �t� glorifi� en lui, mots omis dans Codex Sinaiticus, B, C, D, Itala, mais qui, malgr� ces t�moignages, sont maintenus par Tischendorf, MM. Weiss et Godet) donne � J�sus la victorieuse assurance que Dieu aussi le glorifiera en lui-m�me, c�est-�-dire, l�admettra dans la gloire qui est son essence divine.

C�est ainsi que bient�t J�sus dira dans sa derni�re pri�re?: �?Je t�ai glorifi� sur la terre, j�ai achev� l��uvre que tu m�as donn�e � faire et maintenant glorifie-moi, toi, P�re, aupr�s de toi, de la gloire que j�avais aupr�s de toi avant que le monde f�t?� (Jean�17.4-5).

Paul indique de m�me l�abaissement et l�ob�issance du Sauveur comme le chemin qui l�a conduit � la gloire divine (Philippiens�2.5-11?; comparez �ph�siens�1.20-23). Et il le glorifiera bient�t (grec aussit�t), ajoute J�sus, faisant allusion � sa r�surrection, qui sera le premier degr� de sa glorification.

Enfin, J�sus ne dit pas?: le Fils de Dieu, mais le Fils de l�homme est glorifi� (comparez sur ce terme Matthieu�8.20, note)?; car c�est comme Fils de l�homme, membre et chef de notre humanit� qu�il a embrass�e dans les �treintes de son amour pour la sauver, c�est comme Fils de l�homme qu�il a accompli son �uvre et qu�il est mont� dans sa gloire. Et ainsi, il a rouvert � notre humanit� sauv�e le chemin de cette gloire.

Verset 33

De ces hauteurs de sa gloire, J�sus revient � ses pauvres disciples qu�il va quitter bient�t?: je suis peu de temps encore avec vous et sympathisant � leur tristesse, c�est avec une effusion de tendresse qu�il leur parle?: petits enfants?! (C�est le seul passage de nos �vangiles o� J�sus emploie ce terme).

Il sent le vide immense et douloureux qu�il va laisser dans leur c�ur et dans leur vie?: Vous me chercherez, avec un ardent d�sir de retrouver nos relations actuelles (Jean�20.15. Comparer Luc�17.22).

Mais le moment de la r�union �ternelle n�est pas venu?; il vous reste � accomplir votre t�che et comme j�ai dit aux Juifs, mais dans un sens bien diff�rent (Jean�7.34?; Jean�8.21), je vous le dis aussi maintenant?: vous ne pouvez venir o� je vais.

J�sus, dans ses derni�res communications intimes, va s�appliquer � les consoler de cette s�paration (Jean�14.1 et suivants) et � �lever leur c�ur � la pens�e d�une communion invisible et spirituelle avec lui (chapitres 14-17).

Aussi croyons nous que c�est � ce moment du r�cit de Jean qu�il faut placer l�institution de la c�ne, apr�s laquelle les paroles qui vont suivre (verset 34) sont admirablement appropri�es.

Verset 34

Dans cette tristesse de la s�paration, J�sus fait � ses disciples, comme premi�re compensation de son absence, un don infiniment pr�cieux?: l�amour fraternel.

Il est vrai qu�il s�agit d�un commandement?; mais c�est un commandement qu�il se charge lui-m�me d�accomplir dans leur c�ur et dans leur vie. C�est m�me en cela qu�il est nouveau.

Ce mot a singuli�rement occup� les ex�g�tes. Comment, ont ils demand�, ce commandement de l�amour mutuel peut-il �tre nouveau, puisqu�il se trouve d�j� dans l�Ancien Testament (L�vitique�19.18) et que J�sus lui-m�me le cite comme �tant l��me de la loi?? (Matthieu�22.39) Et ils ont r�pondu?: Il est nouveau parce qu�il renferme tous les autres commandements de la loi (Luther), parce que J�sus l�a renouvel� (Calvin), parce qu�il renouvelle l�homme (Augustin), parce qu�il est toujours nouveau (Olshausen), parce qu�il est le principe d�une vie nouvelle (de Wette), parce qu�il �tablit la diff�rence qu�il y a entre l�amour fraternel (les uns les autres) et la charit� pour le prochain (Grotius et d�autres).

Il y a du vrai dans toutes ces interpr�tations?; mais il est plus vrai encore de dire que ce commandement est nouveau dans son essence, parce que J�sus lui-m�me l�accomplit dans le c�ur de ses disciples par l�amour dont il les a aim�s.

Cet amour

part d�un centre de vie et d�affection nouveau� J�sus a apport� dans le monde et t�moign� aux siens un amour sp�cifiquement diff�rent de tout amour qui avait paru jusqu�alors, celui qui s�attache � la personnalit� humaine pour la sauver. De ce foyer tout nouveau jaillit la flamme d�une affection essentiellement diff�rente de tout ce que le monde avait connu auparavant sous ce nom. En Christ, voil� l�explication du mot nouveau � Godet

Comparer 1�Jean�2.7-8, note.

C�est �videmment l� ce que J�sus a voulu dire en ajoutant dans la seconde partie de ce verset?: que comme je vous ai aim�s, vous vous aimiez aussi les uns les autres.

L�amour de J�sus ne donne pas seulement la mesure mais la nature et le caract�re du v�ritable amour mutuel de ses disciples. Le verset suivant montre l�importance supr�me que J�sus attache � cet amour. Aussi y insiste-t-il � diverses reprises (Jean�15.12, Jean�15.17). Et nul ne l�a mieux senti que notre �vang�liste (1�Jean�2.7-8?; Jean�3.11?; Jean�4.20-21).

Verset 35

L�amour, un amour semblable � celui de J�sus, est la seule preuve que l�homme est sous une influence divine, qui triomphe de tous les penchants �go�stes de son c�ur.

La connaissance peut �tre acquise par des p�cheurs endurcis, la foi s�allie souvent � une vie asservie aux passions, les �uvres sont accomplies par divers motifs?; l�amour seul, unissant les enfants de Dieu les uns aux autres, comme il les unit � leur Sauveur et, par lui, au P�re c�leste, est une marque certaine de leur participation � la nature divine.

� ceci, dit J�sus, tous conna�tront?; et plus loin il voit dans cette unit� des siens un moyen d�amener le monde � la foi (Jean�17.21).

Verset 36

Pierre a compris que le Ma�tre va les quitter pour �tre glorifi� (versets 32 et 33)?; il a m�me compris vaguement que le chemin qui le conduira a la gloire, c�est la mort (verset 37).

Mais, comme cette pens�e, qui le remplit de tristesse, est encore envelopp�e d�obscurit�, dans la vivacit� de ses impressions il l�interrompt par cette question?: O� vastu?? bient�t suivie d�une autre?: Pourquoi ne puis-je pas te suivre??

Il y a encore beaucoup d�ignorance, mais il y a aussi le plus vif amour pour son Ma�tre dans ces questions. Elles sont inspir�es par les m�mes sentiments qui le portaient � r�sister � J�sus quand celui-ci voulait lui laver les pieds (versets 6-9).

La raison pour laquelle Pierre ne pouvait pas suivre J�sus maintenant, c�est qu�il avait son �uvre � faire dans ce monde.

Le disciple aussi a son heure � Meyer

Sans doute encore il y avait, dans son caract�re naturel, plus d�un penchant mauvais dont il devait �tre purifi� par l�Esprit de la Pentec�te, avant de pouvoir suivre son Ma�tre dans la gloire (verset 38).

Mais, ajoute J�sus, comme consolation et encouragement, tu me suivras plus tard?; il le suivra r�ellement par la voie du martyre.

Verset 37

Pierre est parfaitement sinc�re en parlant ainsi. Et pourtant, quel douloureux contraste entre cette d�claration si pleine d�assurance et la r�ponse de J�sus?! (verset 38).

Verset 38

Cet avertissement pr�cis n�emp�cha point la chute du pr�somptueux disciple.

Il para�t pourtant avoir fait impression sur lui, car, d�s ce moment et jusqu�� la fin de ces entretiens, il ne reprend plus la parole.

Voir, sur ce dialogue avec Pierre, Matthieu�26.33-35?; Marc�14.29-31?; Luc�22.31-34, notes.

Apr�s cette interruption, J�sus reprend son discours destin� � consoler ses disciples et � les pr�parer � la communion spirituelle avec lui (Jean�14.1 et suivants).


Informations bibliographiques
bibliography-text="Commentaire sur John 13". "La Bible Annot�e de Neuch�tel". https://beta.studylight.org/commentaries/fre/neu/john-13.html.